Fromathèque

Lorsque l’on vient du Chablais pour se rendre en France ou en Italie, à Chamonix ou à Aoste, on contourne la ville de Martigny (VS) et on aboutit invariablement à un rond-point orné (?) d’une sculpture multicolore et aussi incongrue qu’un entraîneur du FC Sion encore en activité après trois défaites.

Ce rond-point cache, derrière une grande station-service ENI en bordure de la route du Grand-St.Bernard, un magasin très mal mis en valeur appelé la Fromathèque. Pour y accéder en voiture, la manière la plus pratique est de sortir du rond-point en direction du col de la Forclaz, et d’obliquer immédiatement à gauche en direction de Plan-Cerisier, une route qui s’appelle joliment « Route du Soleil Levant ». Un parking à une centaine de mètres à droite permet de ranger son véhicule, car il semble que l’accès en transports publics n’aie pas été spécialement prévu.

Pourquoi vous parler de ce magasin ? Il se trouve qu’il propose une quantité appréciable de produits locaux de qualité vraiment très intéressante. Si par hasard, vous y parvenez, demandez à goûter le patéro… Un pâté apéritif de chasse sublime, une vraie tuerie. Et l’étalage propose une magnifique sélection de fromages et de spécialités du Valais, ainsi que quelques-uns des meilleurs vins du canton. Il pourrait servir de vitrine régionale aux automobilistes venant de France et d’Italie, s’il était mieux mis en évidence; mais il est pratiquement invisible de la route, et ne bénéficie d’aucune publicité particulière. Dommage; mais peut-être ne se soucie-t-on guère des clients étrangers ?

Récemment, je suis passé par cet endroit pour prendre un peu de ce fameux paté-apéritif, le patéro, et acheter du fromage à raclette; j’ai demandé qu’on m’apprête le fromage pour des raclonettes, certes moins pittoresques qu’une raclette traditionnelle avec une vraie meule travaillée au couteau, mais plus pratiques pour déguster une raclette lorsqu’il y a peu de convives. On m’a désigné un étalage où s’empilaient des multitudes de barquettes de plastique avec des portions précoupées de fromage; comme dans n’importe quel supermarché, en somme. J’ai fait remarquer que le plastique ne me semblait pas utile pour une raclette, et demandé un fromage à la coupe; finalement, si je vais dans un magasin spécialisé, ce n’est pas pour obtenir un service que n’importe quelle supérette peut m’offrir. Cette demande a eu le don d’agacer la personne qui me servait; elle s’est retenue de m’envoyer promener, mais tout juste. Elle a cherché deux quarts de meule de fromages (emballés dans du plastique) et m’a demandé quel fromage je désirais. Goûter avant de choisir n’était visiblement pas prévu dans les réponses possibles, donc j’ai demandé innocemment « un bon fromage qui a du goût », et on a bien voulu consentir à me couper dans l’un des quarts de meule la quantité que je souhaitais, mais sans me proposer de l’apprêter en tranches, alors qu’une machine adéquate était disponible. Pour le patéro, on m’a indiqué d’un geste agacé où il se trouvait et je me suis servi. Je dois admettre que la phase du paiement s’est par contre passée sans anicroches : le lecteur de cartes a accepté ma carte de crédit sans se formaliser du fait que je n’étais pas valaisan.

Je veux préciser que la raclette était réellement excellente, et le patéro est une vraie tuerie. Je me répète, mais la qualité des produits de la Fromathèque est vraiment supérieure. Mais pourquoi le service est-il si lamentable, avec un accueil souriant visiblement non prévu dans le contrat d’engagement ? Pourquoi une maison spécialisée dans le commerce et la promotion du fromage ne peut-elle éviter la mise sous barquette plastique de ses produits, alors que partout dans les supermarchés, on tente désormais d’éviter ce type d’emballage polluant, malaisé à recycler et énergivore ? Pourquoi, par ailleurs, l’endroit n’est-il pas mieux mis en évidence, alors qu’il constitue une image promotionnelle pour la région et le canton ?

Il semble que certains ne puissent s’empêcher de répéter encore et encore les mêmes erreurs. On veut promouvoir l’une des plus belles régions de Suisse et du monde pour y organiser un évènement de portée mondiale, et on allume un vieux tonneau rempli de mazout au sommet d’une montagne emblématique. On veut organiser une descente de ski Coupe du Monde dans un site exceptionnel, mais on réserve des créneaux temporels inadéquats et des moyens mécaniques disproportionnés pour « aménager » un glacier qui n’avait pas besoin de cela pour se dégrader. On veut organiser des championnats du monde de ski alpin, mais on délègue la responsabilité des infrastructures à des compagnies étrangères pas forcément concernées par ce genre d’activité. On veut promouvoir les produits locaux, et on installe dans un local situé dans un endroit difficile à localiser des vendeurs peu soucieux de l’accueil des clients.

Ces critiques ayant été faites, je vous conseille tout de même de faire un détour par la Fromathèque; et éventuellement de continuer ensuite en direction du magnifique village de Plan-Cerisier, en faisant un arrêt-apéro à la cave de Florian et Marie Besse (depuis quelques années secondés par leur fille Mélanie) pour une dégustation, et poursuivre ensuite sur la route étroite (en cul-de-sac) vers le restaurant de Plan-Cerisier, qui possède la plus belle terrasse de la région de Martigny. Vous ne regretterez pas vos tribulations, même si l’accueil de la fromathèque puisse éventuellement vous laisser sur votre faim. Et, je me répète encore une fois, les produits proposés sont excellents, même s’ils sont parfois assez mal vendus.

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